Publication Scientifique : « Pollution plastique sur les berges de la Durance »

Premières quantifications et solutions environnementales possibles pour réduire cette pollution.

Publiée le 17 Août 2022 dans la revue  » Frontiers in Sustainability » dans le cadre d’une étude associant chercheurs et sciences citoyennes participatives.

Tosca Ballerini 1,2*†, Nathalie Chaudon 3, Marc Fournier 1, Jean-Paul Coulomb 4,
Bruno Dumontet 1, Eléonore Matuszak 5 and Justine Poncet 6.


1 – Association “Expédition MED” – Mer En Danger, Questembert, France,
2 – Department of Integrative Marine Ecology, Stazione Zoologica Anton Dohrn, Fano Marine Centre (PU), Fano, Italy,
3 – France Nature Environnement Provence-Alpes-Côte d’Azur, Marseille, France,
4 – Ligue pour la Protection des Oiseaux Provence Alpes Côte d’Azur, Hyères, France,
5 – Société Alpine de Protection de la Nature – France Nature Environnement Hautes-Alpes, Gap, France,
6 – France Nature Environnement Alpes de Haute-Provence, Les Mées, France

Ce travail confirme l’opportunité d’utiliser la science participative citoyenne pour recueillir des données pertinentes sur les déchets plastiques et surveiller l’efficacité des réglementations environnementales pour réduire la pollution plastique.
(Extraits de la publication)

Nous présentons ici la première publication scientifique concernant la quantification des macrodéchets sur trois sites en bord de rivière le long de la Durance et sur un site des rives du lac de Serre-Ponçon, en Région SUD – Provence-Alpes-Côte d’Azur.

La pollution plastique est l’un des problèmes les plus pressants de notre époque, avec des impacts négatifs sur les ressources naturelles, les écosystèmes, la santé humaine et le système climatique. L’identification des principaux éléments de détritus jetés dans l’environnement est essentielle afin de prioriser les politiques environnementales pour prévenir les fuites de plastique et promouvoir une économie circulaire.

Les données ont été collectées dans le cadre d’un programme de sciences participatives citoyennes entre 2019 et 2020 à l’occasion de trois périodes de prélèvements (automne, hiver, printemps) sur trois sites des berges de la Durance et de 22 prélèvements sur les rives du lac Serre Ponçon.

Au total, 25 423 déchets ont été catégorisés, dont 82% étaient en plastique.

Les plastiques à usage unique correspondent à 8,13 % du total, tandis que les bouteilles en plastique figurent parmi les 10 premiers déchets articles sur chaque site. L’abondance médiane des déchets dans tous les échantillons est de 2081 déchets relevés à partir du protocole Ospar, sur une bande de 100 m de rive.  Des résultats d’une ampleur supérieure à la valeur du seuil de précaution européen pour les déchets marins (20 objets/100 m enquête). La majorité des déchets (74,83 %) étaient petits et non identifiables. Les morceaux de polystyrène, les plastiques souples et plastiques rigides représentaient la majorité des déchets au total (56,63%) et au S1 (89,28%),36 S2 (58,95%) et S3 (79,60%). Les morceaux de verre correspondaient à 15,83 % du total des déchets.

Des résultats qui révèlent en moyenne une quantité de « 2081 déchets pour 100 mètres de terrain étudié», correspondant à 100 fois plus que le seuil déterminée par l’Europe pour les déchets marins, dont la directive cadre du bon état écologique des eaux marines détermine la quantité limite à 20 objets au maximum pour 100 mètres de rivage.

Les déchets identifiables et identifiés les plus abondants sont les biomédias de stations d’épuration en amont du lac de Serre Ponçon et les bouteilles de boissons à usage unique, en plastique ou en verre.

En zone agricole la présence de nombreux morceaux de plastique souple suggère qu’ils pourraient provenir de films de paillage plastique agricole.

Les morceaux de plastique souple correspondent à la catégorie de déchets la plus abondante dans l’ensemble et correspondent à 58,85 % des déchets lors de l’échantillonnage du site en bordure de la Durance situé en zone agricole et suggérant leur origine (films de paillage plastique).

Face à ce constat alarmant, les solutions suggérées sont de développer des initiatives à la source :

En attendant des réglementations au niveau national et européen, les collectivités peuvent d’ores et déjà limiter de manière significative et immédiate de nouvelles sources de pollution plastique sur leur territoire en développant des stratégies intégrées notamment : en révisant les marchés publics encadrant la collecte, le tri et la gestion des déchets, déployant une animation territoriale au plus proche des citoyens et en expérimentant des solutions de réductions des déchets à la source.


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Présentation

L’accumulation de déchets plastiques dans l’environnement naturel est l’un des problèmes les plus pressants de notre époque avec des conséquences importantes sur les écosystèmes naturels, des impacts sur la santé humaine, et contribuent également au changement climatique (PNUE, 2021b). De 9 à 23 millions de tonnes métriques de déchets plastiques sont émises chaque année dans les rivières, les lacs et l’océan, tandis que de 13 à 25 millions de tonnes métriques par an sont émises sur les écosystèmes terrestres (Borrelle et al. 2020 ; Lau et al. 2020).

Selon plusieurs auteurs, la pollution plastique peut être considérée comme une menace aux limites planétaires (Arp et al. 2021 ; Galloway et Lewis, 2016 ;53 Jahnke et al. 2017, Villarubia-Gómez et al. 2018 ; Macleod et al. 2021 ; Person et al. 2022). Rillig et54 Al. (2021) ont suggéré que nous traversons déjà une période de « dette de toxicité », liée aux conséquences à plus long terme de la dégradation des déchets plastiques telles que la libération d’additifs toxiques associés aux plastiques et leurs fragmentations en nanoplastiques, qui peuvent eux-mêmes donner lieu à des effets toxiques.

Les déchets plastiques pénètrent dans l’environnement naturel principalement en raison de la mauvaise gestion des déchets solides municipaux (Lebreton et Andrady, 2019) et plusieurs initiatives ont été prises au niveau international et national pour réduire les émissions de plastique et de produits chimiques associés (PNUE, 2021b). Pour estimer les efficacités des interventions pour réduire la pollution plastique marine, Lau et al. (2020) ont modélisés les stocks et flux de déchets solides municipaux et quatre sources de microplastiques à travers le système plastique mondial selon cinq scénarios entre 2016 et 2040. Ils ont constaté que dans un scénario de statu quo (BAU), les déchets plastiques mal gérés rejetés dans l’environnement seraient presque multipliés par trois d’ici 2040 et que si tous les principaux engagements actuels de l’industrie et du gouvernement étaient respectés, le monde verrait une réduction des taux annuels de pollution plastique se déversant dans l’océan de seulement 7 % par rapport à (BAU). Si tous les pays du monde mettaient en œuvre la directive européenne sur les plastiques à usage unique (SUPD,67 2019/904/UE), l’une des réglementations les plus ambitieuses pour lutter contre les déchets marins et la pollution plastique, les émissions de déchets plastiques ne seraient réduites que de 15 % par rapport au BAU (Lau et al. 2020).

De nouvelles mesures réglementaires sont clairement nécessaires et en mars 2022, la l’Assemblée de la Cinquième Organisation des Nations Unies pour l’environnement (UNEA-5.2) à adopté une résolution sur un mandat pour un accord international juridiquement contraignant d’ici 2024 pour mettre fin à la pollution plastique tant dans l’environnement marin que terrestre en considérant l’ensemble du cycle de vie des plastiques.

Au départ, l’essentiel de l’attention a été accordée aux déchets plastiques dans le milieu marin (Bletter et al.74 2018). Les rivières ont été reconnues pour leur rôle en tant que source majeure de déchets macroplastiques dans l’océan (Wagner et al., 2014 ; Jambeck et al., 2015 ; Best, 2018 ; Blettler et al., 2018 ; van Emmerik et Schwarz,76 2020) et les apports fluviaux dans l’océan mondial sont estimés entre 0,8 million et 2,7 millions MT (Meijer et al. 2021), alors qu’au niveau européen elles oscillent entre 1600 et 5000 tonnes par an (González-Fernández et al. 2021). Cependant, des études récentes suggèrent que la majorité de la pollution des macroplastiques ne quitte jamais les rivières (Meijer et al., 2021 ; Tramoy et al., 2022 ; van Emmerik et al., 2022). Ce sont les longs temps de séjour des déchets plastiques dans les rivières qui augmentent les effets négatifs des déchets plastiques sur le milieu fluvial.

Les études des macro-déchets sur les rivières se sont multipliées ces dernières années. En Europe, les déchets en plastique étaient prédominant dans les déchets souterrains sur la Tamise au Royaume-Uni (Morritt et al. 2014) ainsi que dans les déchets flottants (macrodéchets) sur la Seine (Gasperi et al. 2014 ; Tramoy et al. 2020) et le Rhône (Castro-Jimenez et85 Al. 2019) en France, sur le Tibre en Italie (Crosti et al., 2018), et le Rhin aux Pays-Bas (Vriend86 et coll. 2020b).

Une étude de 42 rivières et ruisseaux dans 11 pays de l’UE et hors UE a confirmé que les déchets plastiques constituent la majeure partie (82 %) des macro-déchets flottants et ont montré l’importance des plus petits flux de déchets plastiques provenant de l’ensemble du bassin versant d’une rivière jusqu’à la mer (González-89 Fernandez et al. 2021).

Des mesures sur les berges ont montré que les déchets plastiques représentent 94% des macrodéchets sur le fleuve Adour en France (Bruge et al. 2018), 81% sur le delta Rhin-Meuse aux Pays-Bas (van Emmerik et al. 2020), entre 87,5 % et 100 % sur l’Ems, les rivières la Weser et l’Elbe (Schöneich-Argent et al. 2020), 31% sur de nombreuses grandes et petites rivières en Allemagne (Kiessling et93 Al. 2019) et 81 % dans 8 rivières du centre de l’Italie (Cesarini et Scalici, 2021).

Les débris de plastique étaient de 150 % plus lourd en masse que les débris organiques sur les berges de la Seine, en France (Tramoy et al., 2019). En dehors de l’Europe, les plastiques sont les macrodéchets dominants sur les berges des rivières au Chili (Rech et al. 2014), qui ont été trouvé dans tous les sites échantillonnés du système de la rivière Selenga en Mongolie (Battulga et al. 2019) et la rivière Lower Citarum en Indonésie (Hidayat et al. 2022), représentait 88,4 % ou plus des macrodéchets sur la rivière Tukad Badung, à Bali, en Indonésie, et 80,7 % des macrodéchets des berges de la rivière Karamana, Kerala, Inde (Owens et Kamil, 2020).

 L’identification des principaux déchets rejetés dans l’environnement est essentielle pour comprendre ce qui a besoin de plus d’attention et de donner la priorité à des mesures spécifiques pour empêcher d’autres apports et réduire leur abondance dans les écosystèmes naturels (Joint Research Center, 2014 ; Addamo et al., 2017). En France, à côté de l’accueil de l’EU SUPD et du plan d’action national « Zéro Déchet Plastique en Mer » (Ministère français pour la transition écologique, 2020), plusieurs autres initiatives ont été proposées pour réduire les déchets plastiques, comme la « Charte des plages sans plastique » du ministère de l’Environnement (https://www.arbe-regionsud.org/1375-2-chartes-pour-zero-dechet-plastique.html),

Le programme « Zéro Plastique Charte » de la Région SUD Provence-Alpes-Côte d’Azur et la « Charte des rivières sans plastique », présenté aux maires des villes de France en novembre 2021 (https://www.fleuve-sans-plastique.fr/).

 Malgré ces initiatives, les données de base sur les déchets manquent pour la plupart des rivières. Ici, nous présentons pour la première fois des résultats sur l’occurrence de macrodéchets, en mettant l’accent sur les macroplastiques, à partir des berges de la Durance et de la plage du lac de Serre-Ponçon collectées grâce Projet scientifique « Stop plastiques en Méditerranée » avec les sciences citoyennes participatives.

Cette étude a été réalisé sous l’encadrement de l’ONG Expédition MED et a impliqué des volontaires de plusieurs ONG environnementales actives sur le bassin versant de la Durance : du FNE PACA et la LPO Locale,
ainsi que les syndicats de la Durance : Le SMAVD et le SMADESEP.

PREMIERS ELEMENTS DE TRADUCTION de la PUBLICATION,

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Cette étude à été réalisée dans le cadre d’un appel à projet de la Région SUD Provence-Alpes- Côtes d’Azur
avec le soutien du Ministère de la transition Écologique

et de nos partenaires : les groupes SUEZ et NOVAMONT
et la fondation Club Méditerranée

https://edu.ui.ac.id/-/